La liberté d’expression.

Nous avons pris l’habitude d’avoir ce droit et nous le considérons acquis.
Pour ça, il ne faut pas avoir envie de sortir du moule. les pichets sur la planche du tourneur doivent être tous bien pareils et les assiettes doivent s’empiler dans le placard.
Je n’écrirai pas au nom de l’humanité, ni au nom des artistes, je ne m’en sens pas capable, je parlerai de mon expérience d’artiste et des réactions des autres.

Dans ma production de terre vernissée j’ai toujours eu des pièces provocatrices.
Enfin…Moi je ne veux pas provoquer quand je les fais. Je veux m’amuser, me révolter, m’exprimer.
J’ai toujours considéré que je pouvais parler de sexe, de politique ou autre. J’en ai le droit, alors pourquoi m’en priver?
Et toujours le mot «provocateur» revient, comme le mot «narcissique» revient quand on parle de soi ou de son intimité. Seraient ils liés?

Je suis céramiste, mais je suis artiste avant tout, car le médium terre ne me suffit pas.
J’ai envie que mon pays évolue, que les mentalités changent encore et toujours.
Alors je fais des expériences.
Je parle de moi, de mon intimité, de ce que je pense, de mes doutes et de mes envies.
Alors pour certains, je suis provocateur et narcissique. Mais ces jugements sont bien basiques.

Parler de moi, c’est parler des autres. Ne sommes nous pas tous les mêmes?
Quand Brel chante «Ne me quitte pas», c’est son chagrin, mais il nous renvoie au nôtre.
Quand je m autorise à montrer mon corps nu, à le donner à voir, ce n’est pas juste pour me faire plaisir. Je le fais car je veux que ma pudeur disparaisse sur scène. Je le fais aussi pour le droit des femmes, des gays et toutes les autres personnes souffrant de discrimination. J’ai le droit de ne pas faire comme tout le monde.
Quand j’inscris «Salope» ou «Tapette» sur une tasse c’est bien pareil. Je n’ai pas toujours l’envie d’être bien élevé.
La femme à jupe trop courte, n’est-elle qu’une salope? C’est bien triste…
Elle est peut être juste à l’aise avec son corps.
Bien sur je n’ai pas l’énergie de me battre tous les jours contre ça, mais des fois oui.

Quand cette année le musée de Moustiers me contacte pour que je fasse une fresque dans la salle des faïences grotesques, je suis enchanté.
Les décors grotesques me passionnent. C’ est absurde, burlesque, LIBRE!
Je sens très vite que le sujet est scabreux.
Je m’exécute. Le musée est content de mon travail et moi aussi. Je pense avoir fait un bon compromis entre ma liberté d’expression et le respect du public.
Mais la mairie gestionnaire du musée trouve mon travail obscène et pornographique.
On me parle des enfants et des personnes âgées qui vont être choqués, alors je leur propose de mettre des feuilles de vigne sur six personnages parmi la centaine de grotesques peint sur le mur. Ils acceptent.
Je trouvais ces feuilles de vigne très intéressantes, elles montraient les limites autorisées dans la société.
La veille de l’inauguration du musée, un panneau de bois est posé sur la fresque.
Je ne serai averti de ça que quelque heures avant l’inauguration.
Le mail commençait par: «Monsieur Galvin, ce n est pas de la censure mais…»

Cinq mois après, mon travail est toujours muré.

Jérôme Galvin, Février 2014.
"Grande forme aux fleurs" (détail) 2014. Les imprimés floraux, mon jardin, les rosiers, le décoratif...
(Inspiration)
"Les Briques" 2013 (Décembre dans l'atelier avant cuisson)
Photo / Poncif / Essai
Expo "Just do art" au Krash bar (Paris)
"Au dessert" 2013 (décor aux grotesques avant cuisson)
"Charcuterie Madonna" 2013 (détail). Quand j'étais petit mes parents faisaient de la charcuterie, et moi j'aimais Madonna.
Tatouage alphabet & numéros

J’ai beaucoup, sur mes pièces peins des alphabets et des numéros.

Des alphabets comme une matière première (l’écriture, la parole et surtout la communication).
Des numéros pour le rythme ( la dance, l’espace)

La nuit, j’ai souvent fait le même rêve. Qu’un alphabet tombé du ciel venait s’enrouler autour de mon bras et que je me réveillais imprimé à vie de cette rencontre.
On dit qu’il faut réaliser ces rêves…

"Brique tatouée" 2013 Début de recherche sur l'univers du tatouage.
"Petit déjeuné d' été" (Maison/terrasse/amis/soleil/table/petit-déjeuné/bavardages)
"Des Baisers de Bandol" 2013

Mon premier marché de céramique contemporaine fut celui de Bandol.

« Le printemps des potiers » m’a donné ma chance en 2000 je crois.

En 2010, l année de la faïence, je suis l’un des 4 intervenants.

2011, je suis le « prix David Miller ».

Inutile de dire ma reconnaissance…

Terry Richardson (inspiration)
"Tampons"

2007: Je commence à faire des tampons. Je grave des gommes d’école, du caoutchouc, dans l’idée de ne plus utiliser la presse, et de pouvoir les imprimer où je veux.

"Agenda 2005" (détail)

En 2004, sans le préméditer je commence à dessiner, écrire, décorer mon agenda. Moi et les agendas c’est pas si facile.
L’année d’après je décide d’écrire tout les jours ce que je fais, sans sentiments, comme des listes.
Mais il y a des journée plus importantes que d’autres et le besoin de dire se fait sentir.

Je vais faire des agendas comme ça pendant 5 ans.

J’avais, en les faisant, l’idée qu’un jour, peut être, un mec les trouverait comme j’ ai un jour trouvé les cahiers d’écoles d’un autre.
Je ne le connaissais pas, mais ça me faisait rêver encore plus.

"Forme & bout de bois" 2008

Antonio Tapies, c’était quelque chose pour moi…
Début 2000, je découvre le geste, l’abstrait, le graphique, l’intention d’un trait, la rage de l’expression. Mes année de gravure se sont collées sur mes céramiques.

Détail "grotesque à la Jacques Callot"

En 1998, je n’arrive plus à remplir mon rôle d’ouvrier.
Je m’ennuie.
Je craque et démissionne. Je deviens artisan. J’imagine que je peux devenir un faïencier avec atelier, ouvriers et commandes prestigieuses…
Je m’étais bien trompé.
Les premières créations arrivent, tout naturellement je commence à revisiter ce que j’ai appris, à casser, à déstructurer. je m’inscris aux Beaux Arts de Digne les Bains et tombe amoureux de la gravure,ça devient une obsession.

Claude Nougaro (inspiration)
Poncif pour réaliser dans un plat un décor "Bérain"

Quand j’étais ouvrier, décorateur de faïence traditionnelle, le but était de reproduire.

ESSAYER DE FAIRE AUSSI BIEN QUE.

Grand plat rond aux grostesques 1996 (détail)

En 1992, je sors avec le CAP de décorateur céramique du lycée Léonard de Vinci d’Antibes. J’ai 18 ans, retour à Moustiers…
Pendant 6 ans je vais d’un atelier à un autre, et prends ce qu’il y a à prendre. Dans certains j’apprends la qualité, dans d’autres le rendement.

Madonna (inspiration)
04360 Moustiers Ste Marie

J’habite à Moustiers. Depuis toujours, et c’ est assez agréable comme village, l’été j’aime beaucoup.

Si je suis céramiste c’ est grâce (à cause) de Moustiers.

A la sortie du collège, ce qui me passionne c’est: le dessin, la mode et Madonna. Je suis un fils de paysan. Etant trop raisonnable pour devenir un nouveau Jean-Paul Gaultier, Je choisis une formation de décorateur céramique. Je peindrai dans des assiettes, c’est un bon compromis. Dans mon village, j’aurai du travail, c’est concret, ça me rassure.

"Le bon samaritain" (grand plat ovale fin XVII)